mardi 27 mai 2014

Accélération 6 : l' accélération du rythme de vie et la perception du temps

Accélération : ou comment définir notre monde post moderne  par une transformation du temps

Commentaires sur le livre de Hartmut Rosa, sociologue et philosophe allemand, auteur de Accélération La Découverte 2011.

Depuis le XIX chaque génération croit percevoir une augmentation de son rythme de vie pour atteindre un  niveau  jusque là jamais atteint.
Ce sentiment s'accompagne presque toujours de la crainte que celui ci serait excessif.

Selon le sociologue R. Levine on peut mesurer le rythme de vie à l'aide de trois indicateurs :
- la vitesse de déplacement, celle qu'atteignent les piétons au centre ville
- la vitesse du travail par le temps mis par un employé de poste pour vendre un timbre à un client
- la précision  des horloges publiques

L'accélération du rythme de vie se constitue donc d'une augmentation des vitesses d'actif cumulées et d'une transformation de la perception du temps de la vie quotidienne.

1/ Les paramètres objectifs : augmentation de la vitesse d'action

3 stratégies distinctes et combinables :
1/ accélérer l'action elle même = marcher plus vite, parler plus vite<..
2/ réduire la durée des pauses et des temps morts
3/effectuer plusieurs taches en simultanée (multitasking)

# sa thèse : depuis le début de l'époque moderne, le rythme de vie moyen a continuellement  augmenté même si ce n'est pas de façon linéaire

Par elles mêmes la durée de la journée de travail et la quantité de temps disponible hors travail ne disent rien du rythme de vie.
En France l'intensification des tâches au travail est une conséquence directe du raccourcissement de la journée de travail par les 35 h.

# dans la mesure où les sentiments de pression temporelle et de stress sont des indices d'une accélération du rythme de vie , leur augmentation parallèle à l'augmentation du temps libre dans les sociétés occidentales ne doit pas nous surprendre.
De m^me la quantité d'épisodes, d'expériences vécues participent du sentiment d'accélération du rythme.

# Le temps de travail aussi bien que le temps de loisir sont découpés en morceaux où les intervalles deviennent de plus en plus petits et où un nombre croissant d'événements est condensé dans des espaces temporels de plus en plus étroits.

# Les processus de décision concernant les différentes options deviennent de plus en plus complexes.Il en résulte dans notre pratique temporelle un sentiment quasi permanent d'insatisfaction :
=> on est amené à prendre une décision sur un embase d'informations insuffisante
=> on prend le temps de s'informer de façon approfondie et on a le sentiment de perdre son temps
=> on renonce à prendre une décision et on garde le m^me ordo, l'abonnement tel..

#L'abandon des rythmes et des structures temporelles collectifs fait que le découpage du temps est en permanence planifier, négocier en accord avec les autres participants; activités qui prennent beaucoup de temps
-> les rdv sont de plus en plus temporalisés càd pas fixés mais mis au point de façon mobile (mail, sms)
-> les activité s de gestion, de coordination prennent de l'importance
-> les critères de sociabilité évoluent avec la technique : 3j pour répondre à un courrier, 1h pour un mail

#Le temps consacré à la régénération personnelle (sommeil, alimentation, soins corporels)est en baisse ce qui semble indiquer également une accélération du rythme de vie.Selon une étude sur le temps hebdomadaire :
- le temps de sommeil aurait baissé d'1/2 h par rapport aux années 70 (2h/siècle précédent)
- le temps consacré aux repas de 1,8h
- le temps consacré aux soins corporels de 2,2h

2/Les paramètres subjectifs : la pression temporelle et le rapport à l'identité
La baisse des ressources temporelles consécutive à l'accélération se traduit par un sentiment que le temps passe plus vite et par l'impression de ne pas avoir de temps;le sentiment de stress ne dit rien du rythme de vie absolu mais signale ce changement.

#L'accroissement du sentiment de stress va de pair avec un sentiment significatif d'augmentation du temps libre.
Le temps libre estimé est fréquemment sous estimé (comme le temps de tv) par les acteurs et non perçu comme une ressource disponible.
Ce sentiment de pression dans les loisirs se traduit par :
- la peur de manquer quelque chose , de passer à côté de possibilités
- la contrainte de s'adapter à un environnement , qui m^me lorsque l'on s'en extraie le temps d'un congé, continue à se transformer rapidement : partir c'est accumuler des retards que l'on doit comble r( mails..)

#C'est désormais la puissance de l'échéance (deadline) qui détermine l'ordre de succession des activités; d''où le fait que dans une situation où les ressources sont rares,les objectifs non liés à des délais sont perdus revue.

# les générations à venir ne s'impliqueront dans des projets à long terme et exigeant des investissements préalables élevés que si elles y sont incitées par des relations de confiance stables  et des modèles fiables.

# les rapports à soi, notre identité est guidé par notre rapport aux temps : qui nous sommes est toujours déterminé par comment on est devenu ce que l'on est ,par ce que l'on a été, par ce que l'on aurait pu être et par ce que l'on sera et ce que l'on souhaiterait devenir .
- dans de nombreuses sociétés l'identité semble se développer principalement en s'orientant vers le passé et les traditions
-dans d'autres se sont les projections de l'avenir qui sont structurantes
-dans une société où le passé a perdu son pouvoir de contrainte, l'avenir est perçu comme imprévisible  et incontrôlable, ce sont des modèles identitaires référés au présent qui pourraient dominer. D'ou un modèle en rupture avec la modernité : post moderne

#quand tout change en permanence, que par principes les familles, les métiers, las habitats, les convictions politiques ou religieuses changent ou sont  susceptible de changer, on n(et plus en soi boulanger , époux de X, parisien mais pour des périodes imprévisibles : à un moment donné"; le changement social se déplace pour prendre part dans l'identité du sujet.
Le soi se comprime jusqu'à devenir un soi ponctuel.

Conclusion : 
- dans les sociétés traditionnelles au rythmes de transformation plus faibles, les individus sont définis par des structures préexistantes et permanentes donc en fonction d'identités inter générationnelles. La continuité est culturellement valorisée.


- dans les sociétés de la modernité tardive les identités stables et durables ne sont pas en mesure de suivre le rythme élevé des transformations et sont marquées de fractures de sorte qu'on en arrive à des successions intragénérationnelles. La flexibilité et l'aptitude au changement sont valorisées.